Histoires poudreuses et vécues de héros imaginaires, légendes apocryphes de mythes séculaires, tourbillons de fragments de sons et de livres, de textes sacrés et de traductions édulcorées, de cartes au trésor, de biographies d’Atrides, tous et toutes reflétés à l’infini en un kaléidoscope d’images surannées sans cesse rapiécées par les marchands du temple et les sorcières borgnes ; Rennes-le-Château véhicule depuis plus de trente années de bien curieuses aventures, pour mieux célébrer encore le festin des dieux se repaissant ainsi de nos infirmités maladives et grossières, de nos orgueils infinis.

Histoires d’argent maudit et de diable boiteux, de tombes entrouvertes d’où sortent des marquises en mantilles noires et blanches, de Negri d’Ables. Histoires vraies réellement inventées jusqu’à en perdre haleine, d’abbé mythomane, de prêtre assassiné, de cantatrice mystérieuse, de pouvoirs magiques et de philtres d’amour… De grimoires anciens aussi, dissimulés dans des colonnes creuses… Contes à dormir debout ou allégories subtiles ? Devant tant de chausse-trappes à décrypter le questeur devenu fou tel un enfant aveugle perdu au milieu d’une forêt de songes, à tâtons, recherche une sortie, faute d’inventer une fin à son histoire.

Au cœur de ce labyrinthe de brume, déroulant derrière lui une ligne rouge du sang des justes, il s’approche parfois de l’hypothétique centre où, à demi endormi, à demi occulté, veille en embuscade sur un seuil de braises un gardien de feu cornu à souhait officiant comme il se doit, un genou à terre, entièrement satisfait de sa capitation, chargé qu’il est de mentir et d’injurier sans cesse le bon sens comme la vérité. Ainsi de guets-apens en traquenards, le questeur amer troublé par cet autre lui-même, sans autre alternative que de croire à un offertoire corrompu, gave et gobe à satiété la vérité toute crue apportée par les inquisiteurs pourpres et les prêtres enchâssés de certitudes torves dans la faconde mielleuse de leurs connaissances louches.

Qu’en est-il vraiment de ces temps de diète, où l’on prend pour argent comptant l’image comme le mot, pour peu qu’ils fussent imprimés d’abondance ou diffusés sur le Web ?

De ces sortilèges dissonants, nous en avons un aperçu éminent avec Michel Vallet (1), qui vient de faire paraître dans sa revue Pégase No 12 – (juillet-septembre 2005), deux photographies édifiantes, que nous reproduisons ici avec son autorisation. La première, extraite de « La Clé du mystère de Rennes-le-Château », Pygmalion ed. 1998, par Henry Lincoln, nous présente l’abbé Saunière sur son lit de mort… Tel en est en tout cas le commentaire !

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La seconde, la même avec la vraie légende : « Le père Jean, abbé de Fontfroide », extraite d’un ouvrage éponyme, publié à Toulouse en 1896, librairie Privat, (un an donc après la mort du Père Jean en 1895, dernier père abbé de l’abbaye cistercienne) (2). Cet ouvrage fut réédité par les éditions Lacour en 1999.

On le voit, quand la course au scoop rend aveugle, les documents inédits s’échangent et se dénaturent bien plus vite que la corrosion du temps lorsqu’elle officie à son rythme…

Comment Henry Lincoln le célèbre co-auteur de « L’Enigme sacrée » a-t-il pu se laisser abuser ainsi ? Comment a-t-il pu publier ce document factice et surprendre le lecteur ?

La question reste posée, mais a le mérite de permettre à tout un chacun d’exercer son sens critique ce qui ma foi, par les temps qui courent, vaut bien plus que nombre de thèses formulées à l’emporte-pièce par certains auteurs. Car bientôt lorsque l’on vous parlera de la résurrection de l’abbé Saunière, au même titre que l’immortalité de Fulcanelli… ne faites pas l’étonné, tout cela est bien naturel.

Foin d’avarice !

Encore un peu de rata pour la route avec cette surprenante conversation sur le Net, puisqu’il s’agit de « l’assassinat d’Emma Calvé », conversation surprise au détour d’une recherche.

(Par charité chrétienne et par correction pour le webmaster du site internet en question, ainsi que pour les auteurs en grande conversation explosive, c’est le moins que l’on puisse dire… nous respecterons leur anonymat et retranscrivons leur conversation in extenso – dans son jus – orthographe comprise.)

Transcription copiée-collée d’un « chat » sur internet faisant état de l’assassinat d’Emma Calvé et de son appartenance à une société secrète.

[ Pour participer au débat ]

Intervention de J.

Je ne sais ou m’adresser, ma grand mère que j’ai perdu, m’as toujours parlé d’Emma Calvé, qui apparemment l’avait prise sous sa protection, pour retrouver son histoire j’aimerai en savoir plus sur sa vie, ou m’adresser ?

Intervention de S.

Emma Calvé, née Rosa Emma Calvet le 15 août à Decazeville, décédée le 6 janvier 1942 à Millau (Rhodez) (3). Elle avait donc 84 ans à sa mort. Il me semble étrange l’assassinat d’une personne aussi âgée, à moins qu’elle n’ait détenu un « énorme » ! secret. Retenons cependant son origine espagnole, juive sepharade (4), ayant séjournée en Espagne, probablement dans la région catalane espagnole (à quelle date ??). Dans le contexte de la guerre civile espagnole, la préparation de la 2ème guerre mondiale (alliance secrète austro-hongroise-germanique), et l’après guerre, nouvelle alliance des grands industriels, la mouvance anarcho-politico-syndicaliste restait très puissante ; le groupe le plus influent, le plus virulent aussi mais le plus incorruptible était le groupe espagnol et notamment le groupe catalan ; à cette période les artistes les plus en vue appartenaient de près ou de loin à cette mouvance ; Emma Calvé n’ a pas été la seule et unique à y appartenir, il y a bien eut d’autres Emma et d’autres artistes dans cette période d’après guerre.

Emma Calvé a-t-elle était une simple militante ? A-t-elle appartenu au cercle intérieur de l’internationale anarchiste ? Deux faits majeurs historiques viendraient étayer son assassinat (si toutefois il a été prouvé qu’il y a eu meurtre !!! et si son secret était d’ordre politique).

1e – les hommes d’affaires américains se sont sentis menacés par cette mouvance (assassinat d’un industriel important ! par un anarchiste)

2e – Staline ne supportant pas les contre-pouvoirs décidait de déclarer la « guerre » aux soi-disant anarchistes internationalistes de « tous bords », l’histoire a démontré l’efficacité de sa police-politique à l’étranger… Dont acte !

Si Emma Calvé représentait à ce moment la, la cible « privilégiée » à abattre, il y eu sûrement conjuration et collusion des 2 forces émergeantes (contraires ??) à des fins meurtrières. A-t-elle été aussi une Mata Hari après l’âge ? Aurait-elle été trahi sur le tard par son ancien professeur et modèle (car féminin) de chant ? Celle-ci faisant partie de la mouvance italienne !!

Donc une autre piste.

Intervention de B.

Bonjour,

Emma Calvé aurait été assassinée par un membre d’une secte. Quelqu’un de plus informé pourrait-il nous parler de ce fait divers. Il y a du avoir une enquête de faite. Quels étaient le nom de l’assassin, sa profession, sa secte ?

Il se pourrait qu’il aie été artiste lui aussi. Il semble que le milieu d’artistes aie connu bien des secrets placés sur commande dans leurs tableaux, livres, cathédrales etc., certains semblent comme Georges Sand craindre pour sa vie d’avoir certaines connaissances (?). (Et in Arcadia ego). Certains à d’autres époques sont suicidés (au réverbère) (5) etc. Pour en avoir trop dit ou écrit. Connaître Emma Calvé permettrait peut-être de savoir de quel ordre est le secret.

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Photo du château de Cabrières – archives Arcadia

Sans commentaires.

Nous laisserons donc le soin à nos lecteurs avertis, férus de mystère et non dénués d’humour de démêler ce salmigondis d’informations totalement inédites, qui nous laisse admiratifs.

Rappelons quand même pour faire bonne mesure, qu’Emma Calvé meurt de crises hépatiques, le 5 janvier 1942 et non le 6, à la clinique du docteur Parès, à Montpellier, dans l’indifférence générale. Elle sera inhumée dans le cimetière de Millau, à quelques kilomètres de son château tant aimé. Elle avait eu le temps d’écrire quatre ans auparavant ses mémoires qui parurent aux éditions Plon, avec 16 gravures hors texte, sous le titre, « Sous tous les ciels j’ai chanté ».

Signalons au passage qu’elle ne s’appela jamais Calvé de Roquer, titre usurpé, et qu’elle n’était pas née en 1862 comme elle désirait parfois le faire croire (6)…

Mais aux âmes bien nées on accorde parfois beaucoup plus que leur dû.

Thierry E Garnier © la LdThot – décembre 2005

Cet article est un extrait de la conférence de Thierry E Garnier,
présentée au IVe Symposium – Alterna Terra, les journées de l’étrange – le dimanche 6 novembre 2005.

En illustration :
– photographie du Père Jean © Toulouse, librairie Privat – 1896. Et article Pégase No 12.

– Château de Cabrières, porche d’entrée.
Photographie inédite – TEG © Archives Arcadia-DR.

On remarquera en effigie, au dessus de la porte, un blason martelé et aujourd’hui totalement indéchiffrable, vraisemblablement une reproduction tardive des armoiries du premier seigneur du château, Emenon de Cabrières, blasonné ainsi « De gueules à un bouc d’or ». L’étymologie du mot « Cabrières » renvoyant ici dans son double aspect héraldique à la « cabre » la chèvre d’or gardienne des trésors mythiques, et bien sûr au bouc, figure satanique s’il en est.

Une fois de plus les deux extrêmes se rejoignant, dans une symbolique de premier degré.

(1) Rédacteur en chef de la revue «Pégase», publication qui connut deux parutions à deux époques distinctes. Michel Vallet est certainement à ce jour un des meilleurs connaisseur du mystère de Rennes, il est notamment l’auteur sous le nom de Pierre Jarnac de : Les livres qui ont fait la renommée de Rennes-le-Château- (Belisane ed. 2002),

(2) Rappelons au passage que l’abbé Saunière décède lui en 1917.
Cette information a été communiquée par Morgan Roussel, bibliophile, dans un
forum consacré à Franck Daffos et à son livre « Le secret dérobé ».
Cf. Pégase No 13. Voir aussi www.rennes-le-chateau.net

(3) Il s’agit sans doute ici de la ville de Rodez ? Orthographiée avec un h, pour faire plus exotique ? Quant à [Millau-Rod(h)ez], je laisse le soin à l’auteur de ce passage distingué d’éclairer la lanterne de nos abonnés ? (NDLR // la LdT.)

(4) Ah bon ? (NDLR // la LdT).

(5) «Le suicide au réverbère», sans doute une nouvelle technique qui reste à breveter… C’est Gérard de Nerval qui doit se retourner dans sa tombe, au Père Lachaise (électrique ?) – (NDLR // la LdT.).

(6) Sur Emma Calvé et Rennes-le-Château, voir nos différentes études.

– Numéros spécial Arcadia, juillet 2002 – page 17, 90 et notes.

– « Sur les Remparts de Saint-Jean-d’Acre », Arqa ed. pages 149 & 161.
Et Rennes-le-Château, (Idem – op.cit) page 89.

– Voir aussi, « La Lettre de Thot » Nos 7, 8, 26, 31, 32.

– Sur le site de Thot : Voir [Emma Calvé] en rubrique > Galerie avec des documents inédits, archives Arcadia.

A écouter le «Best Of» des chansons d’Emma Calvé, Arqa ed. avec des documents inédits, iconographie et photos dans le cahier joint.

En rubrique > Boutique sur le site de Thot – http://thot-arqa.com