Nous montrerons dans cette étude que le septénaire se divise en fait en deux ensembles, l’un à valeur symbolique (à 4 planètes) et l’autre opératif (lunaisons (avec les 4 semaines)-Saturne (avec les quatre étoiles fixes). Saturne est en polarité avec les luminaires tant en domicile qu’en exaltation. En revanche, les positions du «quatuor » varient d’un dispositif à l’autre.
L’on sait que le système des rapports planètes/signes (maîtrises) est bancal. D’une part en raison des exaltations, de l’autre parce que certains signes ont plus de maîtres que d’autres, du fait d’un nombre encore insuffisant de planètes signalées au-delà de Saturne. Diverses solutions ont été proposées, dont l’idée d’ajouter deux transplutoniennes, quel que soit le nom qu’on leur donne, qu’elles existent ou non pour l’astronomie actuelle.
Il reste que dans le cas de Mars et de Vénus, la plupart des astrologues semblent rester très attachés aux doubles domiciles alors même que l’on y a peu ou prou renoncé pour Mars, Saturne ou Jupiter. Mais, même pour les tenants d’une douzaine de planètes, il en est qui insistent pour que chaque planète dispose de deux signes (ex. Lisa Morpurgo, cf. notre entretien sur teleprovidence avec Carla Preto) voire de quatre (en dédoublant les exaltations).

Nous aurions donc deux options : l’une qui voudrait que l’on ait 12 planètes pour 12 signes, l’autre qui s’en tient aux doubles domiciles et au septénaire planétaire. Mais, il existe en fait une troisième solution, qui nous vient de Manilius, à savoir que ce qu’il y a à associer ce ne sont pas des planètes mais des dieux, ce qui remet en question un certain postulat selon lequel l’astrologie n’aurait accès à la mythologie que par le truchement de l’astronomie, ce qui confère aux récentes découvertes (depuis Galilée et en tout cas depuis Herschell) une portée singulière. Nous pensons, pour notre part qu’un tel principe doit être évacué et que les dieux ont servi depuis fort longtemps à structurer la cyclicité astrologique, non pas astronomiquement mais symboliquement.

On s’intéressera ici avant tout au « couple » Mars-Vénus, si malmené et il est peut-être temps que cela cesse car cela plombe notamment tout l’enseignement de l’Astrologie, notamment quant au rapport planète/saison et signe/saison.

Commençons par souligner le fait que les astrologues ne peuvent s’empêcher de définir les planètes par les saisons et les signes auxquels ils sont censés correspondre, ce qui est déjà en soi une démarche vénusienne (cf. infra), s’interdisant toute révision quant au fond. Bien des réformes sont restées très en surface et ont été surtout des placages.

Prenons donc le cas Mars-Vénus.

Quand on demande aux astrologues si Mars est une planète de printemps ou une planète d’automne, ils répondent évidemment : les deux puisque… Mars est à la fois maître du bélier et du scorpion. Ils ne se demandent donc pas ce qu’est Mars mais ils nous informent de ce qu’en dit la doctrine astrologique, c’est dire leur peu d’esprit critique.

Et cela continue : quel est le petit prof d’astro qui n’a pas expliqué à ses élèves que Mars donnait toute sa force à l’élan printanier, à l’énergie bélier ?
Le problème c’est que d’une part, il y a Vénus juste après dans son domicile du taureau et de l’autre, il y a un autre domicile de Mars dans un signe d’automne et vice versa pour Vénus.

On nous explique que ce n’est pas le même Mars, pas la même Vénus. Mais qu’est ce que ces archétypes qui seraient porteurs de significations aussi contradictoires ? Or, l’on dispose aussi des positions d’exil et de chute qui permettent précisément de situer une planète dans des signes opposés aux domiciles. C’est ainsi que l’exil de Mars en balance jouxte son ‘trône » en bélier. Idem pour Vénus.

Si l’on admet que Mars est puissant dans une saison, il ne saurait l’être dans la saison opposée. Nous dirons même que Vénus est une anti-Mars et Mars un anti-Vénus, un peu comme le jour et la nuit. C’est l’un ou l’autre à un instant T.
Mais on n’est pas sorti de l’auberge. Car que se passe-t-il quand on n’a plus affaire à des concepts que l’on peut maitriser et que l’on passe à des astres dont les mouvements sont autonomes et indépendants les uns des autres ? L’astrologie est beaucoup plus libre que l’astronomie pour s’articuler sur la philosophie car elle ne prend du cosmos que ce qui lui convient et le retravaille à sa guise.

Pour comprendre la dialectique Mars-Vénus, qui résume, en quelque sorte, toutes les autres, nous dirons que Vénus améliore les choses en y ajoutant quelque élément (un ornement) tandis que Mars les améliore en leur ôtant quelque élément (par exemple une tumeur). On notera que l’on peut multiplier à l’infini les ornements alors que lorsque l’on supprime, l’on est forcément très limité et tout en arrive à converger vers une certaine unité.

L’association de Mars avec le printemps est des plus douteuses. On notera déjà qu’au niveau des couleurs, le printemps n’est pas rouge comme le sang qui coule d’une plaie causée par une arme comme la lance qui atteignit mortellement le roi Valois Henri II en tournoi, en 1559. C’est en automne que les feuilles (mortes, cf. Prévert) tendent à devenir rouges, rousses. La tradition veut que le temps des amours (Vénus) soit au printemps, on sait que les naissances (Vénus, l’enfant est le fruit des amours) doivent au moins équilibrer les décès (Mars).

Mais le vrai problème est ailleurs : un tel dispositif d’attribution de secteurs à telle ou telle planète (avec les décans, ce sont 36 secteurs bien différenciés, comme chez Lisa Morpurgo) ne signifie pas que cela concerne le mouvement réel des planètes, surtout si, comme chez Manilius, il y a des dieux qui n’en sont pas. En fait, la vocation première d’un tel système est du même ordre que la symbolique zodiacale à laquelle le dit système est d’ailleurs associé. Il s’agit de marquer des stades successifs franchis par un vecteur/curseur astronomique, en l’occurrence chacune des lunaisons, d’où la présence au cœur des « dignités » des luminaires, au solstice (domiciles) et à l’équinoxe (exaltations). Autrement dit, vu que d’une lunaison à l’autre, cela avance d’environ 30°, on se trouve chaque fois dans un contexte symbolique différent. Mais le seul apport de l’astronomie à ce stade concerne les luminaires et non les dieux, planètes ou non planètes. C’est donc une erreur que d’accorder quelque signification à la découverte de nouvelles planètes portant les noms de dieux qui n’avaient pas encore été associés à des astres (transsaturniennes, astéroïdes entre Mars et Jupiter, Chiron, entre Saturne et Uranus, sans parler des planètes transplutoniennes etc.).

En fait, pourquoi ne pas en revenir plus simplement à l’iconographie mensuelle des almanachs et abandonner celle, frelatée et perturbée des signes et des dieux qui n’en sont, de toute façon, que l’émanation, la dérivation ?

Cela ne signifie pas que l’Astrologie se soit définitivement limitée aux lunaisons. Selon nous, le principe des lunaisons fut, ultérieurement, transposé sur une autre échelle de temps, en adoptant Saturne et en l’inscrivant dans une série de quatre et non plus douze conjonctions avec les 4 étoiles fixes qui seront, de ce fait, dites royales, ce qui constitue quatre phases de 7 ans, chacun se divisant en deux parties de 3 ans et demi (Yin Yang, Vénus/Mars). C’est la base de l’Astrologie Double Carré (ADC).

C’est plus tard que sur la base des domiciles que l’Astrologie aura intégré (cf la Tétrabible de Ptolémée) les autres planètes du système solaire (qui ne l’était pas encore, avant Copernic). Il s’agit là d’une erreur d’interprétation qui d’ailleurs sous tend l’idée même de thème natal, incluant tout ce qui se passe dans le ciel en un instant T. On a alors basculé d’une astrologie cyclique avec un curseur unique à une astrologie de position, correspondant à la pratique des astronomes lesquels auront forgé l’astrologie moderne dont il faut à présent se débarrasser et dont eux-mêmes se sont éloignés, tout en continuant à s’ amuser à donner des noms de dieux ou de demi-dieux aux nouveaux astres.
Cela dit, force est de reconnaitre que le système des doubles domiciles fait sens dès lors qu’il représente un processus évolutif suivi d’un processus involutif, en sens inverse. Mais nous pensons que la meilleure formule consisterait à attribuer à chaque saison une planète : les planètes dites intérieures Vénus (taureau) au printemps, Mercure (vierge) à l’Eté, et les planètes extérieures (à l’orbite terrestre et à la révolution supérieure à un an) Mars (Scorpion) à l’automne et Jupiter (poissons) à l’Hiver, autour d’un pôle représentant les curseurs (Soleil-Lune (Cancer-Lion) et Saturne (Capricorne- verseau). En fait, il s’agit bien d’un système à quatre temps si l’on distingue entre les planètes-symboles (Mercure-Vénus-Mars-Jupiter) et les planètes actives. (Luminaires-Saturne). Les premières n’intéressent pas l’astrologie par leur mouvement mais par leur position céleste inchangée spatialement les unes par rapport aux autres. Entendons que le fait que des planètes portent les noms de ces quatre dieux n’implique pas qu’on les considérera du point de vue de leur parcours sur le zodiaque à la différence des lunaisons et de Saturne. En ce sens, le dispositif des domiciles, des exaltations mais aussi celui de la semaine (où l’on commence avec les luminaires et termine avec Saturne, le dimanche (Sunday) étant en fait le premier jour de la semaine, dans la tradition juive, Yom Rishon) atteste de ce distinguo entre ces deux catégories d’astres : on rappellera que les luminaires ne portent pas de noms de dieux dans la tradition astrologique. Quant à Saturne, il est en retrait par rapport au monde de l’Olympe. Ajoutons à propos des jours de la semaine (mais cela vaut aussi pour les heures planétaires) que cela n’a rien à voir avec une quelconque réalité astronomique. Le rapport Astrologie-Astronomie est donc bel et bien duel, on pourrait dire que la Lune et Saturne sont des astres masculins et que le quatuor Mercure-vénus –Mars-Jupiter est féminin.
Pour en revenir au débat actuel (voir le site La raison et l’Astrologie) concernant les horoscopes des journaux, nous dirons que pour nous il existe trois astrologies, celle qui s’articule sur la formation des lunaisons et qui découpe 12 secteurs, laquelle astrologie ne coïncide d’ailleurs nullement avec l’entrée du soleil dans un signe (comme le font les dits horoscopes) qui en dérive, une autre qui s’intéresse aux conjonctions Saturnes-étoiles fixes royales qui est une transposition de la première et enfin, l’astrologie du thème natal qui ne respecte plus de cycle central et qui nous apparait, de loin, comme la plus contraire à l’esprit de l’astrologie. Or, au lieu d’opposer à la première forme d’astrologie la deuxième, on lui oppose une troisième qui, elle, bafoue l’idée d’un cycle central, qui est au cœur même de toute vraie problématique astrologique, du fait qu’elle considère le ciel comme un espace englobant tout ce qui s’y trouve et non comme un espace traversé par un cycle, lequel se perpétue en franchissant un nombre infini de configurations qui sont autant d’épiphénomènes. On sait que le grand reproche qui est fait par les astrologues « sérieux » est le caractère général des descriptions mais là encore, il s’agit d’un contresens, le propre de l’astrologie étant en effet de montrer les récurrences et les similitudes par delà la diversité apparente des choses, des gens, des événements. Il n’y a d’astrologie que du général.

Jacques Halbronn