Pour la première fois en Europe, quatre dragons ou varans de Komodo, issus d’une fécondation mystérieuse, ont vu le jour récemment dans un incubateur du zoo de Londres, grâce à une coopération avec le parc animalier français de Thoiry (Yvelines), a-t-on appris lundi auprès de ce dernier.

Les petits reptiles d’une quinzaine de centimètres de long, qui dépasseront toutefois les trois mètres une fois adultes, sont sortis fin mars d’oeufs pondus par Sungaï, originaire de Thoiry et envoyée à Londres dans le cadre d’un programme d’élevage européen de cette espèce menacée.

La décision de la prêter au zoo d’Outre-Manche avait été prise par la directrice de Thoiry, Colomba de La Panouse, afin d’éviter une union consanguine car Sungaï et son compagnon Kinaam étaient cousins. Ainsi, le couple a dû faire grotte et jardins séparés, avant de rejoindre d’autres partenaires. L’an dernier, Sungaï s’est retrouvée à Londres, et Kinaam dans un autre zoo britannique, celui de Chester.

Et là, le mystère commence. A peine arrivée, avant de rencontrer son nouveau compagnon et deux ans après sa séparation d’avec Kinaam, Sungaï a pondu des oeufs fécondés, dont sont issus les quatre bébés.

Normalement, après fécondation, l’incubation dure environ huit mois (200 à 220 jours) chez ces reptiles « préhistoriques ».

« Deux hypothèses sont possibles, explique le fondateur du parc de Thoiry, Paul de la Panouse. Soit les femelles de dragons de Komodo ont une spermathèque, c’est-à-dire que Sungaï a gardé vivants, pendant deux ans, les spermatozoïdes ou les oeufs fécondés par Kinaam, soit elles peuvent se reproduire par parthénogenèse, c’est-à-dire s’auto-féconder, en produisant des clones d’elles-mêmes. »

La réponse sera donnée par une étude génétique, qui permettra aussi de déterminer le sexe des bébés (impossible à déduire de leur anatomie). Mais, pour Paul de la Panouse, « il y a neuf chances sur dix que le père soit Kinaam ».

Les varans de Komodo sont originaires d’Indonésie, plus précisément de la petite île volcanique dont ils portent le nom ainsi que de l’île voisine de Rinca et d’une partie de l’île de Florès. Leur population, inférieure à 3.000 individus, est menacée à la fois par les risques d’éruption volcanique et le braconnage des cerfs, sangliers et d’autres herbivores dont ils se nourrissent.