Nous prônons une astrologie s’articulant sur deux carrés, au sens géométrique du terme –et non au sens astrologique actuel, quand on parle d’un aspect de carré. En fait, n’y aurait-il pas déviance de la théorie des aspects ? Est-ce que l’idée initiale n’était pas de faire apparaitre le fait que les astres suivaient, astrologiquement, tout au long de leur parcours cyclique une certaine figure géométrique, dont les angularités correspondaient à des changements de périodicités ? C’est ce qu’illustre la théorie des Grandes Conjonctions Jupiter –Saturne qui repose sur un triangle, puisque tous les 20 ans environ, la conjonction franchit 120°, soit le tiers d’un cercle. Pour notre part, nous penchons plutôt pour la structure en carré, articulée sur les conjonctions de Saturne avec les quatre étoiles fixes royales, donc sur une réalité stellaire et non pas planète/planète.

Ces deux figures correspondent respectivement aux triplicités pour les triangles et aux quadruplicités pour les carrés. Nous n’avons jamais éprouvé beaucoup de sympathie pour les triangles en astrologie en ce qu’ils sont décalés par rapport aux quatre saisons, qu’ils divisent le cercle en 3 fois quatre signes au lieu de 4 fois trois signes. Il est remarquable que, comme à son habitude syncrétique, les deux systèmes cohabitent en Astrologie; celui du triangle et celui du carré, le premier étant considéré généralement comme harmonique et le second comme dissonant. Cela fait, en tout cas, un système de trop.

On aura compris que pour nous, les aspects servent d’abord au niveau prévisionnel, sur une certaine durée et non pas tant sur le plan de l’instantané du thème natal. La nouvelle astrologie doit, selon nous, faire ressortir une dynamique selon laquelle un astre féconde tour à tour, telle une abeille, les pointes d’un carré ou si l’on préfère d’une étoile à huit branches(cf. notre étude à ce sujet).

On peut certes tenter de nous expliquer que grâce au triangle, chaque pointe du carré se trouve différenciée puisqu’elle se trouvera associée à un élément différent (feu, terre, air, eau) mais cela est de peu d’utilité si l’on renonce à opérer une telle différenciation, si ce n’est dans un but toujours utile de localisation spatiale. Quant à associer chacun des 12 signes avec une combinatoire triangle/carré, est-ce vraiment utile si l’on s’en tient à la réforme allemande de l’astrologie survenue au XXe siècle, autour notamment de l’Allemand Reinhold Ebertin, avec le système à 90° (Kosmobiologie) changeant les carrés et oppositions en conjonctions et le Zodiaque à une zone de 90° au lieu de 360°.

A-t-on vraiment besoin de l’alternance des carrés et des trigones pour faire fonctionner l’astrologie ? Nous pensons que l’on peut très bien produire une alternance en découpant le cercle en huit secteurs de 45° sans avoir à passer par les trigones qui ne s’inscrivent pas au sein des carrés à la différence des semi-carrés. Pour nous, l’alternance, à chaque signe et demi, entre un temps A et un temps B – que l’on peut définir comme on voudra – nous avons proposé ailleurs nos propres interprétations mais là n’est pas ici le débat- est infiniment préférable au chevauchement entre carrés (et semi-carrés) et triangles (et sextiles, 60°). On observe immédiatement qu’on est dans le porte à faux. Certes, on peut avoir un même point de départ et d’arrivée pour les deux figures (0°-360°) mais les étapes intermédiaires s’entrecroisent de façon inégale, soit un ensemble fort peu économique et assez déséquilibré.

Si l’on comprend que le carré inscrit dans le cercle est la transposition, non seulement du cycle saisonnier ou du cycle diurne mais aussi du cycle soli-lunaire, le triangle, quant à lui, ne correspond à aucune structure naturelle signifiante. Même les tables et les chaises, les pièces d’une maison sont ancrées sur le 4. Or, le plus étonnant est que l’on ait pu faire du trigone un « bon » aspect alors qu’il a tout à fait le profil inverse, celui d’un aspect à contretemps. Inversement, pourquoi, donc, le carré devrait-il être, comme c’est le cas en pratique, un aspect problématique dans le système prévisionnel des astrologues ?

Tout se passe comme si l’astrologie ne cessait d’être victime de surenchères. Vous utilisez telle planète, pourquoi pas telle autre, vous utilisez telle figure géométrique, pourquoi pas telle autre ? Kepler aura largement failli, dans sa réforme de l’astrologie, conduite voilà 4 siècles, lui qui n’a rien trouvé de mieux que d’introduire de nouveaux aspects, ne comprenant pas que l’astrologie s’est construite sur des choix et qu’elle ne peut gérer une trop grande quantité d’informations sans brouiller son message…

Rappelons que la tradition a instauré des signes cardinaux, fixes et mutables, et que les signes d’un même groupe sont en quelque sorte en carré ou en opposition entre eux, ce qui ne serait pas cohérent s’il fallait retenir la thèse d’une quelconque incompatibilité entre signes d’une même catégorie. Selon nous, le classement selon les Quatre Eléments est venu s’ajouter inutilement. Quant à J. P. Nicola, il a tenté de justifier ces deux types d’aspects « bons « et « mauvais » par le fait qu’il y aurait une division en deux ou par multiples de deux qui serait dissonante (180, 90, 45) et une division en trois ou par multiples de trois qui serait harmonieuse.(120, 60, 30) Or, la division en 2 nous semble déterminante : on coupe un gâteau en 2, puis en 4, puis en 8, la division en 12 parts casse le rythme, même si le 12 est fourni par le cycle soli-lunaire et par le cycle de Jupiter, important en astrologie chinoise avec ses 12 années zodiacales.

L’abandon du référentiel stellaire aura finalement conduit à la théorie d’Albumasar (Aboumashar, Xe siècle de notre ère voir illustration) sur les conjonctions entre deux planètes, à savoir les plus lentes connues au Moyen Age, Jupiter et Saturne. Avec ce cycle, ni Jupiter, ni Saturne ne préservent leur cyclicité de base qui est respectivement 12 et 28 ans. Ils se rejoignent tous les 20 ans, ce qui est un chiffre intermédiaire qui ne vaut ni pour l’un ni pour l’autre. A partir de là, évidemment sont venus se greffer toute une ribambelle d’autres cycles bi planétaires. Le sept n’est produit que par le rapport de Saturne avec le carré et ses quatre pointes. En revanche, le douze, on l’a dit, sied à Jupiter. Notons que tous les 4 ans, Jupiter parvient à une nouvelle pointe du trigone (polygone à trois côtés).

La « guerre » entre le triangle et le carré, c’est un peu celle de Jupiter et de Saturne. On sait qu’ils s’affrontent et se défient dans la mythologie. Jupiter échappant au sort de ses frères, Neptune et Pluton, dévorés par leur père Saturne/Kronos puis parvenant à les délivrer. Mais encore une fois, pourquoi l’astrologie devrait-elle s’encombrer de plus d’une planète ? Elle n’a véritablement besoin que d’un cycle central, que l’on peut distribuer, à loisir, entre les dieux, en subdivisant le dit cycle en 12. Mais ce n’est pas une nécessité. L’important, c’est de garder à l’esprit que tout cycle passe, à un moment donné, par un temps de reflux tout comme le jour alterne avec la nuit, tout comme quand nous parlons, nous pouvons dire ce qui va et ce qui ne va pas, ce qui est « possible » et ce qui est « impossible » sans avoir besoin d’autre chose que d’un préfixe et non pas d’un mot radicalement nouveau.

Jacques HALBRONN