J’aurais pu intituler ce billet « Sur Internet, il y a tout : tu parles… #2 », ça ne vous aurait pas forcément incité à le lire ; ou « Cannibalisme », puisque c’est bien de ce dont il s’agit, mais vous auriez trouvé ça trop racoleur. Tout en y allant puisque, qu’on le veuille ou non, les histoires de transgression sont vendeuses. Et on est là presque à la transgression ultime. Restons donc sobres.

Sobres ? Ce n’était très certainement pas le cas des invités de cette émission de radio des années 90 dont je vais vous parler, et qui semblaient fins faits. A cette époque, je faisais beaucoup de route, un long trajet fixe qui m’obligeait à changer sept fois de fréquence (à multiplier donc par 2 pour l’aller-retour) pour rester sur cette fameuse radio nationale qui prétendit un temps être faite pour un nombre certain de gens ayant quelque chose entre les oreilles. Ce qui fit de moi un fidèle – à défaut de l’être quotidiennement – auditeur de Daniel Mermet et de son émission Là-bas si j’y suis.

Je ne peux donner une année exacte, mais c’était entre 1992 et 1994. Ce jour-là, Daniel Mermet recevait les co-auteurs d’un livre des plus sérieux qui, et je pense que mon souvenir est bon, s’intitulait Le Cannibalisme et venait de paraître chez un éditeur de renom. On put se rendre rapidement compte (et pendant un bon moment, car l’émission était plutôt longue) que le journaliste et ses invités avaient dû déjeuner ensemble de façon copieusement arrosée. Ce qui transforma cette forte interview en quelque chose de très sympathique. Quelques fois un peu dérangeante de par le décalage entre le sujet et le traitement guinguette que nos trois compères lui donnaient. Ah, qu’ils riaient de bon cœur en nous contant que les derniers grands cannibales de la planète étaient les Chinois et que dans certaines de leurs campagnes isolées, il valait mieux ne pas s’égarer la nuit !

L’émission fut pour moi tellement marquante, que j’y repense de temps à autre. Que j’en parle aussi volontiers à l’occasion. Voici peu, j’ai tenté une recherche sur Internet. Avec les plus gros moteurs de recherche spécialisés dans les livres : rien. Dans votre Gogole favori, avec « 1992 1993 1994 cannibalisme » : aucun résultat pertinent au bout de 5 pages (fallait-il aller plus loin ?).

La solution : sur le catalogue de la BNF, il y a un livre qui semblerait bien le bon, Le Cannibale : grandeur et décadence, par Franck Lestringant, Perrin, 1994* ; mais ça ne fait qu’un auteur. Où est l’autre ? Ou : où est l’autre livre ? Ou dire que les Chinois sont encore cannibales est-il politiquement incorrect à ce point… dont je vous laisse juges ? Ou me serais-je abusé ? C’est toujours possible, l' »enthousiasme » des intervenants m’ayant alors fait croire qu’ils étaient plus que deux.

Ce texte aurait donc un titre abusif. Mais vous avez remarqué que son contenu n’est pourtant dénué ni d’objet, ni de sens…

Daniel Mermet, promis : je vous en reparle un jour.

Michel MOUTET

* On trouve de ce livre quatre (!) exemplaires à la vente sur Internet, dont un seul en France, et trois à des prix particulièrement prohibitifs.